José Bruffaerts       Ecrivain Public

 

 

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Plein Feu sur le Brocard

 
 

 

Le peintre  donne  une âme  à  une  figure ;
Le  poète  prête  une  figure  à un sentiment ;
L’art et le talent du caricaturiste les transfigure !

 

Mille millions de mille sabords de tonnerre de Brest !  Voilà bien ma chance, le dossier était à peine mis au placard que je ne pouvais m’empêcher d’éprouver une impression de malaise !  Une sensation d’être passé à côté de la montre en or.  Le pressentiment d’avoir conçu un radeau de la Méduse « new wave ».
Je m’explique !  Avant de réaliser une œuvre, tout artiste qui ne veut pas passer pour un fasaadeklasjer (= gribouilleur bruxellois) élabore au préalable des schémas, ébauche des esquisses, crayonne ou fait des croquis. Or, cette info, je l’ai passée à l’huche.  J’ai tout simplement blackboulé une évidence.
Aussi, avant de me payer un embarquement pour Cythère, aurais-je mieux fait de prendre un bon vieux ferry au lieu de d
(é)river au petit bonheur la chance sur une barge !
Bref, retour à la case départ et place au dessin !  

Depuis plus d’un siècle, caricaturistes, illustrateurs et dessinateurs ont scruté à travers la presse le Tour de France, contribuant par leur narration familière et populaire à édifier l’extraordinaire patrimoine culturel et artistique qu’il représente.  Ces hérauts du dessin ont chanté et enchanté de leur art humoristique et satirique l’odyssée moderne qui reste sans doute l’événement sportif le plus prisé et médiatisé de l’année.
Le dessin d’actualité, qui évolue à la lisière des arts plastiques graphiques et visuels, ne se limite pas cependant aux exploits du Tour de France. Il pète la forme dans tous les styles, sous tous les aspects, dans toutes les expressions esthétiques. Il se différencie de la BD de par la schématisation d’un état ou d’un événement en deux ou trois coups de crayon. Hélas, le revers de la médaille veut que les dessins qui surfent sur le buzz du jour perdent de leur sel au fil du temps.  C’est pourquoi certains artistes les complètent par un petit commentaire qui s’avère utile pour une meilleure compréhension après coup. (cf. note ultérieure).

Le Tour de France étant repris en haut d’affiche, je commencerai par René Pellos (René Pellarin),le premier caricaturiste attitré de la Grande Boucle et qui le resta pendant de très longues années.  Le père adoptif des Pieds Nickelés, reconnu par ses paires comme « le roi des dessinateurs sportifs », affirmait en son temps qu’il n’y avait rien de mieux que le dessin pour reproduire la réalité.

     
   

Voici un extrait de sa profession de foi : « Le dessin est capable de transcrire le mouvement, la vitesse, le déséquilibre alors que la photographie fige les personnages.  Le dessin saisit l’action dans son moment le plus intense, le plus dramatique.  Si la photographie a la valeur d’un document témoin, faut-il encore que le témoin soit présent au moment de l’événement.  Le dessinateur, lui, pour avoir assisté à des moments semblables et à la vue de quelques indices, le relate et en donne un témoignage visuel

En fait,  cette assertion a la valeur d’un copier/coller de l’idée que je me fais de la représentation graphique du vélo.  Une réserve toutefois : la photographie a fortement évolué ces dernières années (cf. le premier volet de l’étude).
Cependant, c’est avec respect que je mets ce brillant illustrateur de la presse sportive en tête de peloton. Très peu académique,  son sens d’observation lui a permis de croquer les champions, leurs lieutenants, les sans-grades, les porteurs d’eau et autres gregari del plotone, son art le dispensant de rédiger une légende élaborée.  Ce coup de patte magique a immortalisé la grande boucle pendant près d’un demi-siècle.  C’est donc avec curiosité et admiration que j’ai épluché un par un ses dessins.

Ainsi…
après les interminables élucubrations à propos de la « Symphonie Bicyclette », il coulait de source que je fusse interpellé par sa vision intitulée « Et roule…la galère » ? La revue « Miroir Sprint » publia le dessin à l’occasion de la présentation des coureurs de la grande boucle en 1949.

Quand on fait le parallèle entre les deux illustrations, une foule de ressemblances saute aux yeux de quiconque veut bien s’immerger un tant soit peu dans l’atmosphère de la grande parade.

Les composantes sont pratiquement identiques d’autant si on assimile les montagnes grimaçantes aux fumerolles de Dali.   Or, la scène de « « La Symphonie Bicyclette » est un pot à encre alors que la galère de Pellos est cousue de fil blanc.  Bien mieux qu’une photographie, l’artiste décrit l’ambiance qui règne au départ de la grande boucle.  Les forçats de la route sont tous crispés en quête de gloire et de…souffrances.  Mais ils sont malgré tout heureux d’avoir trouvé une place dans cette galère où Henri Desgranges mène la barque en tête de proue. Quant à Jacques Goddet, qui opère en tant que maître d’œuvre, il fait le ménage du haut de la plate-forme alors que dans la fosse aux galériens on reconnaît Coppi, Bartali, Kubler, Impanis, etc.
Ultime comparaison.  Le dessin de Pellos ne dégage malheureusement pas plus de dynamique que la litho de Dali. Mais qu’à cela ne tienne, il se rattrapera dès la première échappée.
Quoi qu’il en soit, il est une certitude que son coup de crayon et son interprétation des événements sportifs n’ont pas laissé ses contemporains indifférents.  A la même époque en Belgique, trois humoristes croqueront avec une virtuosité identique les courses cyclistes et les autres manifestations sportives.

http://www.marc-sleen.be/fr/accueil

Il s’agit de Marc Sleen, un caricaturiste de presse, considéré comme l’un des quatre  pères de la bande dessinée flamande, qui égaiera les pages du « Standaard » pendant un long bail  et Horn (Fernand Van Horen) qui fut le dessinateur humoriste attitré du journal « Le Soir ».

Quant à Buth (Léo De Buth), il eut une idée géniale qui enthousiasma toute une génération de mouflets et autant d’adultes.  L’aventure démarra en 1947 avec les exploits de Thomas Pips au Tour de France, un Thijl Uilenspiegel moderne.  Une icône dans laquelle tout Flamand aime à se reconnaître.  Attaché au journal « Het Volk » (Le Peuple), l’humoriste fit exploser le tirage quotidien pendant le Tour de France.  Tout en relatant un événement de l’étape, au moyen d’un dessin bien sûr, le lecteur était appelé à chercher une ou plusieurs souris dissimulées dans le paysage.  Cette belle histoire se poursuivra jusqu’en 1982.

http://www.ecc-kruishoutem.be/buth_ENG.htm

Ces quatre caricaturistes, parmi une ribambelle d’imagiers humoristiques et satiriques, ont donc contribué à populariser le Tour de France, voire à l’édifier en patrimoine culturel.  Ces poètes de l’image ont élevé leur art, né de la presse sportive, à une notoriété équivalente à la BD.  Mais cette observation est aussi valable pour tous leurs confrères qu’ils fassent référence ou non au vélo, quelle que soit la situation, comique ou dramatique.
Aussi est-il faux de croire que les caricaturistes aient attendu l’avènement du Tour de France pour railler les travers de leurs contemporains par le biais du vélo !

    

Avant de poursuivre ma tirade, il me semble qu’une petite digression à propos de la BD ne ferait pas de tort.  En effet, ébaucher une étude sur le dessin, la caricature et le strip (fractions de page sous forme de bandes de quelques images) sans évoquer Hergé (Georges Remi) relèverait tout bonnement de crime de lèse-artiste.  Passer outre eût été un sacrilège !  Oncques ne me l’auriez pardonné, mes tendres loutes bédéphiles.  Il est impensable de dissocier complètement la BD de la caricature bien qu’il y ait des différences majeures entre les deux disciplines. Cool please et permettez-moi d’adresser un petit coucou à celui que l’on considère comme le père de la BD européenne.    En avril 1925,  à l’âge de 18 ans à peine alors que son coup de crayon est encore très mal assuré, Hergé croque   pour « Le Blé qui lève » quatre dessins sur les « Plaisirs du vélo » où un cyclotouriste regonfle son pneu tellement fort qu’il le fait exposer.  Par la suite, il fera très peu allusion au vélo dans les aventures de Tintin.  Deux éphémères apparitions à relever.  L’une dans « Le Lotus bleu » où Tintin prend la poudre d’escampette sur un vélo d’emprunt, la seconde dans « Les Bijoux de la Castafiore » où, une fois de plus, il subtilise un vélo pour un déplacement imprévu.  Jo-El Azara (Joseph Loeckx), dessinateur au journal “Tintin” et créateur de « Taka Takata » (un petit soldat Nippon, myope et pacifiste), participa à l’élaboration de cet album.  C’est probablement dans les studios d’Hergé qu’il acquiert un graphisme précis mettant surtout l’accent sur la lisibilité.    En parallèle, il mène aussi une carrière d’illustrateur publicitaire et réalise entre autres une affiche pour la société Alvarez.

www.taka-takata.com

Un peu moins d’un siècle avant le carrousel de la Grande Boucle, les dessinateurs de la presse anglaise, ayant pris pour modèle les archétypes de la société et le folklore, s’appliquaient à reproduire à l’envi des clichés satiriques. Les brocardeurs étaient impitoyables passant tous les thèmes à la moulinette. Débordant d’imagination, ils élaboraient des scénarios loufoques dans lesquels le peuple se reconnaissait et s’identifiait. Moyennant des observations pointues, une déformation des visages, un sur-embellissement des formes et une extravagance comique des costumes, ces humoristes se moquaient ouvertement des travers et des tendances qui animaient le peuple londonien de l’époque.  Des affiches furent spécialement créées à l’intention des indigents pour leur permettre de participer à la curée des mœurs.
Aussi, fin 18e – début 19e siècle, dès l’apparition des draisiennes et des célérifères ensuite, les caricaturistes ont vite compris que la chute d’un vélocipédiste engendrait des situations pleines de vie et de burlesque. Normal donc que le « Royal Hobby » ait fait les beaux jours de la presse caricaturale anglaise.

Sous le Second Empire, la presse satirique française exploita également le thème par l’intermédiaire du lithographe, Charles Vernier qui écorcha un peu moins les personnages.

      

Quant à mon coup de chapeau, il va à Fred Booty, un caricaturiste australien du XIXe siècle qui œuvra pour le compte du Sunday Times et du Sun.  Son dessin dégage un effet de mouvement, ponctué pour la circonstance d’une courte légende très subtile.

Comme en peinture, il s’avère impossible de prendre en considération tous les dessinateurs qui ont repris le thème du vélo dans leurs cartons.
Il ne me reste donc plus qu’à écrémer superficiellement la liste des ténors qui surfent (ou qui ont surfé) sur le buzz du jour et qui le passent (ou qui l’ont passé)  à la centrifugeuse.



http://faizant.over-blog.com/article-61667742.html

En tête de liste, je mets Jacques Faizant bien qu’il n’ait jamais voulu véhiculer une dynamique de la bicyclette dans ses dessins.  Usant de la forme rétro, voire anachronique, ses caricatures  sont remplies d’une malice ponctuée d’un trait de vérité moderne.   Si je devais lui attribuer un sobriquet, ce serait celui de bon père tranquille de la caricature vélocipédique. Ecrivain et éditorialiste au quotidien « Le Figaro », ce dessinateur de presse avait tout compris du cyclotourisme. Ayant retiré une saine philosophie de sa passion, il l’a rendue au centuple en mettant tout son talent au service de cette dernière.

En quelques mots, il résume tout un art de vivre :

« Sortir de chez soi avec tout son bien dans une ou deux sacoches, mettre ses gants, s’asseoir sur sa selle, poser le pied sur la pédale, regarder le ciel et partir.  Le cyclotourisme, c’est cela.  C’est la liberté d’aller là où l’on veut, par des chemins que l’on aime, à la vitesse que l’on supporte, dans le temps que l’on s’est donné, avec les amis que l’on s’est choisi…

Le cyclotourisme, c’est la joie du corps et de l’esprit, la perplexité des gérontologues et le désespoir des pharmaciens
. »

En bon humaniste, ce dernier a préfacé « La grande meule et la moulinette », l’album de Guy Perpère, un humoriste et fabuliste qui s’exprime par le biais d’une planche de 8 à 9 dessins limpides et expressifs.

Voici l’éloge qu’il formule à son égard : « Guy Perpère, qui a fait les beaux jours de la revue « Cyclotourisme » de la FFCT, est un humoriste d’humeur et de talent constant…Le dessin d’humour s’exerçant toujours au détriment du sujet traité, il est extrêmement difficile de se moquer de ce que l’on aime sauf à le faire avec tendresse, ce qui est précisément le cas ici.. »

Mon ultime allusion à la BD, je l’adresse à Christian Lax, l’auteur de « L’Aigle sans orteils ».  Une histoire poignante qui laisse le lecteur sans répit, ce dernier ne parvenant jamais à décrocher la roue du héros avant l’arrivée.

Exit et désolé  pour les laissés-pour-compte tels que les Garréra, Graton, Franquin et tous les autres qui ont donné ou donnent encore des lettres de noblesse à la BD grâce à la création de figures emblématiques comme les Vélomaniacs, Michel Vaillant, Gaston Lagaffe, etc. dont  l’énumération ne peut qu’éveiller de la mélancolie parmi plus d’un d’entre-nous.

Au cours de mes errances sur le net, j’ai observé une particularité récurrente qui revient aussi bien en dessin qu’en écriture : au plus l’auteur est un adepte passionné, au plus le trait est juste et la description palpitante.
A  l’inverse de « Marianne », le personnage fétiche de Jacques Faizant, le graphisme dépouillé du « Chat » renforce le message que Philippe Geluck tient à faire passer auprès du public.  Il considère le dessin comme un coup de boule, un concentré d’idées qui surgit comme tel.  Cela doit être une image qui jaillit d’emblée.  Le texte au contraire est une introspection dans laquelle il part sans savoir où il arrive, dit-il.  Certaines de ses légendes le surprennent.  Aussi écrit-il et réécrit-il très souvent ses textes. Par ailleurs, il aime faire appel à la zwanze bruxelloise pour en accentuer le surréalisme.  Il s’exprime très souvent par l’intermédiaire d’un dessin d’humour en deux ou trois cases disposés horizontalement.   Toutefois, comme son « Chat » affirme que « si je roule à vélo, c’est uniquement parce que je n’ai pas trouvé quoi faire d’autre avec un vélo » ou bien encore « si je devais vraiment rouler à mon rythme, je ne roulerais pas », je crains que le cyclotourisme ne soit pas son truc.  Au suivant !



http://www.geluck.com/geluck.html

Un autre géant du « comics strip » fut Guy Bara (Guy Willems) qui railla les mœurs des golden sixties par l’entremise de son héros, Max l’Explorateur, un personnage atypique en tenue coloniale tout à fait décalé avec son époque.  Il collabora de nombreuses années au magazine satirique du « Pourquoi pas ? ».  Un hebdomadaire belge qui passait l’actualité au crible et qui accueillait à bras ouverts les brocardeurs de tout poil.
Un périodique qui s’ingéniait à sortir des cadavres des tiroirs comme le fit en France un siècle plus tôt « Le Grelot », « L’Eclipse », « Le Sans-Culotte », « Le Bouffon », etc.  Un demi-siècle avant Hara-Hiri et Charlie Hebdo.



http://guybara.blogspot.com

Ce constat me donne l’occasion d’ouvrir une page spéciale où le vélo métaphorise un tas de situations cocasses. En effet, la « petite reine » est très prisée pour commenter les décisions politico-politiciennes.
Les caricatures politiques apparaissent d’habitude à la page éditoriale d’un quotidien ou d’une revue.  C’est un art visuel dans lequel le caricaturiste s’efforce de faire valoir son point de vue à propos d’une situation ou d’un événement scandaleux, loufoque ou bizarre. Il faut savoir que les caricaturistes ont différentes techniques à leur disposition pour faire passer leurs messages.  Les uns exagèreront les caractéristiques propres à un personnage pour le rendre reconnaissable comme le faisait les dessinateurs anglais du 18e siècle,  d’autres préfèreront procéder par analogie c'est-à-dire représenter une situation par une image différente mais dont le contexte est similaire.    

Et me revoilà au pied du mur hutois !  Celui des lamentations d’Anne-Marie !  Qui vais-je choisir comme porte-drapeau pour représenter tous ces dessinateurs qui se pètent les neurones pour passer en tête sous la banderole ? A qui le privilège ? Le styliste parfait ? Le graphiste méticuleux ?Le suceur de graphite qui s’ingénie à trouver la formule idéale ? Le bulliste hors norme ?  Bullshit!  It’s all the same!  La voie royale des Champs Elysées de la caricature grouille de monde.  Les places sont hors concours !  Pour mémoire, les Albert, Turner, Euvrard, Felix, Royer, Brasser, Plantu, Iturria, Vadot, Chappatte, Dubus, Bellus, Dubouck, Lanvin, Kristian, Kari, Vicky, Simoni, et veux-tu encore des Cabu ?  Non !  Alors, voilà des Zaza, tous plus féroces les uns que les autres !

Au fait, à propos du « Pourquoi Pas ? », pourquoi pas ne pas céder le relais à la paluche brocardeuse de Pierre Kroll ?  Un ancien du magazine éponyme. Un artiste éclectique qui respire la forme dans toutes les disciplines confondues.  Animateur à la télé, illustrateur, auteur et comédien sont quelques facettes dans lesquelles l’humoriste brille partout avec autant de bonheur. Tous les dimanches midi à la télé, il étripe une sournoiserie politicienne, une escroquerie bancaire, un coup de gueule d’un partenaire social, une fumisterie sportive, une imposture religieuse, etc.  Il passe la mauvaise foi et les faux-semblants à la moulinette et au lieu d’en sortir du hachis parmentier, il met en évidence le gâchis entier exploité par les éblouis du promontoire.  Sa dextre démarre sur la feuille en moins de deux.  Aérienne, elle trace des traits énergiques qui superposent les traits flous en un tournemain. Le poignet souple, les doigts décontractés.  Il ne relève la tête qu’en fin de carton.  A la rigueur, il examine encore une fois le tracé et crayonne éventuellement un détail mal venu en le noyant dans une furia de ronds ou de zigzags.  Comme les croquis sont réalisés à la main levée, souvent en présence d’une caméra, je suppose que logiciel, calques, vectorisation et colorisation sont tous logés aux abonnés absents. Pas le temps de soigner outre mesure la recherche graphique, la mise en page et le crayonné.  Dessin et trait d’humour jaillissent en un tour de manivelle !  De par son attitude, il se démarque tout à fait de l’humour un peu potache de la bande dessinée franco-belge, notre Tintin national emmenant le peloton. 





http://www.kroll.be/index.php?option=moi

Le Campionissimo et le Cannibale nous ramènent bille en tête sur le Tour de France qui reste encore et toujours la vache à lait des caricaturistes sportifs.


Le Campionissimo & l’Auguste père Bruffaerts

 


Au tour du Cannibale…
 

Un mot à propos de C. Leboul, un peintre breton qui a le mérite d’avoir représenté avec beaucoup de justesse celui que Luc Varenne impatronisa en prince de légende : « Eddy, mon petit ». Le critique littéraire sampétrusien Alain Viray mettait le doigté de l’artiste en valeur en précisant : « Claude Leboul décline la force élémentaire, celle qui vient des jarrets, du corps tendu et du souffle, la volonté du champion en mouvement, les tensions d’une lutte au sommet.  Il n’oublie pas les masques des cyclistes, visages infiniment déformés par l’effort ».


C’était au temps où…
http://www.cyclojose.be/ColdesChamps.html

Autre style, même combat.  Philippe Tastet est un humoriste contemporain qui se fait un point d’honneur d’appliquer la chronique d’André Laurens qui opéra comme premier médiateur de presse en France au journal « Le Monde » :
 «  Le dessin est, dans la presse, une autre façon de réagir à l’actualité.  Le rédacteur (idéal) décrit, explique, analyse avec souci du détail, la volonté d’être complet, le sens de la nuance, de la mesure et de la distance.  Le dessinateur exprime un état d’esprit, une émotion ; il donne un coup de projecteur, résume une situation en une synthèse graphique inattendue, il opère des rapprochements détonants.  Le dessin est réactif, subjectif, virulent ou tendre, réducteur et spontanément ouvert à l’imagination… »

Il faut reconnaître que l’artiste  réussit à mettre en musique cette ligne de conduite dans laquelle il parvient à inclure très souvent l’effet de dynamique.  Un détail qui n’est pas toujours évident chez tous ses confrères.  Les uns préfèrent avantager le contenu de la bulle, d’autres soignent davantage le graphisme au détriment de la légende.
L’idéal bien sûr se résumant à combiner en toute harmonie les deux méthodes.  Pour que l’interprétation ne prête pas à confusion, Philippe Tastet n’hésite donc pas à ponctuer ses dessins  par un mot d’explication.  Excellente idée !  Cela permet de resituer et restituer l’action dans le temps.  Cette remarque vaut autant pour la presse sportive que pour  l’actualité politique, sociale et autres.
Car, comment voulez-vous interpréter et décoder un dessin sans connaître le fin fond du sujet ?



http://www.philippetastet.com

A l’approche du 07.07.2007,
deuxième anniversaire des attentats sanglants de Londres
et le jour où
le départ du Tour de France sera donné dans la capitale britannique,
la vigilance doit être redoublée.

A l’inverse de la peinture, le dessin caricatural, qui se veut le reflet d’une situation ou d’une attitude à un moment bien déterminé, a souvent du mal à bien vieillir.  Bis repetita.   Un fait d’actualité ne se commente plus de la même façon avec quelques années de recul. C’est la raison pour laquelle j’ai un faible pour les « Parisiennes » de Kiraz qui n’ont pas pris une seule ride depuis leur création.
La parisienne de Kiraz est une sérial shoppeuse aux grands yeux en amandes, la bouche sensuelle en forme de cul de poule et les cheveux fins et raides.  C’est une croqueuse d’hommes qui n’hésite pas à troquer une mini ravageuse, découvrant la quasi-totalité de ses gambettes interminables, pour une jupe glamour ou un mini bikini.  Juchée en équilibre instable sur des escarpins, elle s’applique à mettre en valeur sa croupe callipyge et ses petits nénés hauts perchés. « Fashion » jusqu’au bout des ongles, elle met tout en œuvre pour scotcher les regards sur sa petite personne.  Et pourtant, en dépit de son apparence provocante, elle arbore un petit côté godiche qui lui permet de bien faire passer la pilule. Manipulatrice et indémodable, cette nymphette,  sexy en diable, est un numéro avec qui tout homme se fait une joie d’emmener Popaul au cirque !  Ravageuse ! Intemporelle, elle est devenue l’icône de la ville lumière.


« L’allure, le style, la démarche, les poses, jusqu’aux mimiques, on voit qu’Edmond Kiraz est un amoureux des femmes.  Il les regarde et elles sont tellement charmantes qu’à leur vue, il les croque (…) »
rappelle Olivier Dassault.

Un trait de crayon et une légende qui plaisent encore et toujours à l’heure actuelle.  Des dessins qui ne cessent de faire mouche. Bientôt un demi-siècle de bouteille et « la parisienne » est toujours dans le vent avec autant de fraîcheur !  Le rêve de toutes les nanas !


Je me demande
si je noie mon chagrin
dans le travail
ou
dans un autre grand amour

Je ne pouvais décemment pas terminer mon exposé sans adresser un petit flash à un vieux complice matheux qui se bagarre depuis des décennies avec la pesanteur et les résistances.  Ce qui l’a amené à décomposer les forces, les dodécomposer, les fractionner, les diviser, les sectionner, les proportionner, les vectoriser, les relativiser et puis les collationner, les recomposer, les champagniser, les allégoriser et finalement les gobertiser en vue de découvrir la roue philosophale de la petite reine !
Ses folles échappées sont à découvrir dans l’encyclopédie Cotacol :
http://kuitenbijters.com/index.php/de-encyclopedie-cotacol

Je suis persuadé  que mon ami Daniel finira par trouver la formule pour qu’un jour tout vélo s’en vole sans peine, ni assistance à la conquête des plus hauts sommets.
En attendant, il fait grimper les cyclos d’Europe et d’ailleurs grâce à son : http://www.challenge-big.eu


Mais voilà !  Avant les élucubrations de Daniel, il y eut les débordements d’Archimède, la chute libre d’une « Pink Lady » et peu après au 19e s. les extravagances d’un certain Christophe (Georges Colomb).  A ne pas confondre avec le patron des routards, ni avec le célèbre navigateur génois.  Œuf corse, vous rétorquerait l’astucieux commissaire San-Antonio.  En effet ! Puisqu’il s’agit d’un biologiste de formation et auteur d’histoires illustrées qui eut la très bonne idée d’introduire l’humour dans de nombreuses matières pédagogiques. Ce moraliste dans l’âme créa de toute pièce un petit « Einstein » avant la lettre. Un savant obnubilé par une idée fixe qui supplante largement les divagations philo-physico-matheuses de mon ami Daniel alias Presi-Dan.   Pancrace Eusèbe Zéphyrin Brioché, dit « Savant Cosinus » inventa 36 systèmes de locomotion pour faire le tour du monde dont l’ingénieux, l’incomparable et l’inégalable super bici ex machina : 

l’anémélectroreculpédalicoupeventombrosoparacloucycle.  

Une bicyclette révolutionnaire propulsée par une petite voile arrière (aném), équipée d’un petit moteur électrique (électro) s’inspirant du principe de la réaction (recul), munie de pédales (pédali), protégée par un coupe-vent destiné à favoriser la pénétration dans l’air (coupe-vent), coiffée d’un parasol faisant fonction de cockpit (ombroso), pourvue d’un chasse clou pour prévenir les crevaisons (para-clou), le tout étant monté sur une paire de roues (cycle).

Extrait :

« La trouvaille de Cosinus se résume à un engin dans lequel sont utilisées toutes les forces propulsives connues et même inconnues. Il l'a fait exécuter et un beau jour il s'élance suivi de Sphéroïde
(son chien). Malheureusement les détonations successives et répétées de l'appareil à recul ont pour effet de faire naître une émotion intense dans la gent canine, naturellement ennemie des progrès qu'elle ne comprend pas. Je connais bien des gens qui seraient, à ce point de vue, dignes d'être chiens… »


Hélas, ce super bike ni aucune autre de ses inventions farfelues ne parviendront à aller au-delà de la banlieue.  Son humour se décline au premier degré et plus finement en seconde lecture.
Retrouvez les aventures sur : http://aulas.pierre.free.fr/chr_cos_01.html 

Si la « Parisienne » est toujours fringante après un demi-siècle, « l’idée fixe du Savant Cosinus », en revanche, a accédé à l’immortalité grâce au génie de Goscinny et Uderzo  qui l’ont bombardé légionnaire romain à la solde de Tullius Detritus, le plus abject semeur de « Zizanie » que la Gaule d’Astérix n’ait jamais connu.  Acta est fabula.

Fin du tour d’horizon sur le dessin d’actualité et la caricature, une rétrospective qui est sans conteste beaucoup trop subjective, artificielle, partiale et personnelle mais qui met le pied à la pédale pour quiconque veut élargir son champ de vision en la matière.

Par conséquent, hors de question d’attribuer un bouquet de fleurs comme à chaque arrivée de course cycliste, mais mise à l’honneur d’un trio de repêchés.  Comme au keirin.  Et, en bien en tout honneur, allons donc « Au Vélodrome », chez mon premier repêché.

En évoquant Jean Metzinger, il n’entre absolument pas dans mes intentions de rouvrir le débat entre les cubistes et les futuristes.  Considéré comme « cubiste de salon », il puise ses sujets dans les spectacles populaires du sport ou de la danse.
Et pourtant…  Dans son œuvre intitulée « Le Cycliste », il opère une symbiose entre les deux tendances de l’époque, ce qui le situe bien à l’avance de son temps dans le Pop Art et la bande dessinée.  Cycliste et arrière plan sont réduits à des formes géométriques, en conformité donc avec l’esthétique prônée par le cubisme.  Mais comme le peintre a ajouté les effets de vitesse et de mouvement, il est indéniable que le tableau dégage aussi une prédisposition prononcée pour le futurisme.

Mon second repêché sera un « ex-conquérant de l’espace ».  Carmelo Cappello est considéré comme le plus grand interprète du ‘spatialisme’  dans le domaine de la sculpture dont le programme se définit : « ni peinture, ni sculpture, mais formes, couleurs et sons dans l’espace ».   L’idée de base du spatialisme est d’ouvrir la pratique artistique aux avancées scientifiques les plus récentes ce qui se traduit en somme par la conquête de l’espace.

Les lignes aériennes et le mouvement dégagés par « Velo azzuiro » font de cette lithographie un archétype de cette école artistique. Pour ma part, je retrouve aussi dans cette représentation un peu de similitude avec l’’envolée de Hajime Kato.  Avec un brin d’imagination, on y détecte même les idées maîtresses du futurisme : vitesse, mouvement, modernité. 

http://www.jeffparr-veloart.com

Quant au dernier élu, c’est un cycliste britannique passionné, Jeff Parr, qui jaillit du peloton à la manière de son compatriote Mark Cavendish.
Pour le last jump, je cède volontiers la plume aux critiques artistiques contemporains de Jeff.

“Throughout his professional career, Jeff’s passion and inspiration has always been the vélo. 
His emotions are portrayed so vividly in his paintings with a sense of speed, excitement and beauty of movement. 
Today's acrylics and oil paints, with their luminosity and vibrancy, allow him to juxtapose the transitory and fleeting motion of the peloton in contrast with an immutable environment.
Depicting the legends, the passion, the evocative sensations whilst also paying homage to the greats of professional cycling over the decades, he invites the viewers into his paintings without necessarily making it easy for them."

Traduction libre :

« Tout au long de sa carrière professionnelle, le vélo a toujours été la passion et la source d’inspiration de Jeff.  Son art est imprégné de ses vives émotions, qui se traduisent dans son œuvre par une dynamique où la beauté du mouvement éclabousse le visiteur dès le premier coup d’œil.
La  luminance et la vibrance des  peintures à l’huile et acryliques actuelles lui permettent de juxtaposer le mouvement éphémère et fugace d’un peloton et de le contraster par rapport à un environnement statique.
En croquant la légende du cycle et les passions qu’elle déchaîne d’une part, et les  états d’âme renforcés par le respect qu’il convient de témoigner aux champions cyclistes professionnels d’autre part, il invite les visiteurs dans son univers sans pour autant  leur donner le sésame de son univers
. »

Il me semble que le commentaire résume assez bien le brio du peintre qui, pour parvenir à ses fins, utilise divers supports et surmonte le défi artistique en maîtrisant le mouvement et l’abstraction spatiale.  Il séduit l’amateur d’art de par l’association de différents courants artistiques tels que l’impressionnisme, le surréalisme et le futurisme pour ne citer que ceux-là.  Aussi ne suis-je absolument pas surpris de retrouver dans ses toiles des allusions à des peintres comme
Shigedi Kuroda ou Hajime Kato.  En cela, il a été devancé par une foule d’artistes, dont pas les moindres.

Ainsi en dépoussiérant mon chiffonnier, j’ai retrouvé « Le Sprinter », une reproduction de Salvador Dali qui ressemble furieusement au « Ciclista » d’Umberto Boccioni.
Or, le maître du surréalisme n’était qu’un enfant à l’époque.  Ce qui a tend à dire que tout artiste peintre, quel qu’il soit, subit  volontairement ou sans s’en rendre compte, des influences extérieures.

Quant à la question fondamentale concernant la vérité artistique, je la verrais située quelque part entre toutes les différentes esthétiques !

Vrai ou faux ?  Bof !  A chacun sa vérité.


                   
 

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