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Le peintre donne une âme à une figure ;
Le poète prête une figure à un sentiment ;
L’art et le talent du caricaturiste les transfigure !
Mille
millions de mille sabords de tonnerre de Brest ! Voilà bien
ma chance, le dossier était à peine mis au placard que je ne
pouvais m’empêcher d’éprouver une impression de malaise !
Une sensation d’être passé à côté de la montre en or. Le
pressentiment d’avoir conçu un radeau de la Méduse « new
wave ».
Je m’explique ! Avant de réaliser une œuvre, tout artiste
qui ne veut pas passer pour un fasaadeklasjer (=
gribouilleur bruxellois) élabore au préalable des schémas,
ébauche des esquisses, crayonne ou fait des croquis. Or,
cette info, je l’ai passée à l’huche. J’ai tout simplement
blackboulé une évidence.
Aussi, avant de me payer un embarquement pour Cythère,
aurais-je mieux fait de prendre un bon vieux ferry au lieu
de d(é)river
au petit bonheur la chance sur une barge !
Bref, retour à la case départ et place au dessin !
Depuis plus d’un siècle, caricaturistes, illustrateurs et
dessinateurs ont scruté à travers la presse le Tour de
France, contribuant par leur narration familière et
populaire à édifier l’extraordinaire patrimoine culturel et
artistique qu’il représente. Ces hérauts du dessin ont
chanté et enchanté de leur art humoristique et satirique
l’odyssée moderne qui reste sans doute l’événement sportif
le plus prisé et médiatisé de l’année.
Le dessin d’actualité, qui évolue à la lisière des arts
plastiques graphiques et visuels, ne se limite pas cependant
aux exploits du Tour de France. Il pète la forme dans tous
les styles, sous tous les aspects, dans toutes les
expressions esthétiques. Il se différencie de la BD de par
la schématisation d’un état ou d’un événement en deux ou
trois coups de crayon. Hélas, le revers de la médaille veut
que les dessins qui surfent sur le buzz du jour perdent de
leur sel au fil du temps. C’est pourquoi certains artistes
les complètent par un petit commentaire qui s’avère utile
pour une meilleure compréhension après coup. (cf. note
ultérieure).

Le Tour de France étant repris en haut d’affiche, je
commencerai par René
Pellos (René Pellarin),le premier
caricaturiste attitré de la Grande Boucle et qui le resta
pendant de très longues années. Le père adoptif des
Pieds
Nickelés, reconnu par ses paires comme
« le roi des dessinateurs sportifs », affirmait en
son temps qu’il n’y avait rien de mieux que le dessin pour
reproduire la réalité.

Voici un extrait de sa profession de foi :
« Le dessin est capable de
transcrire le mouvement, la vitesse, le déséquilibre alors
que la photographie fige les personnages. Le dessin saisit
l’action dans son moment le plus intense, le plus
dramatique. Si la photographie a la valeur d’un document
témoin, faut-il encore que le témoin soit présent au moment
de l’événement. Le dessinateur, lui, pour avoir assisté à
des moments semblables et à la vue de quelques indices, le
relate et en donne un témoignage visuel.»
En fait, cette assertion a la valeur d’un
copier/coller de l’idée que je me fais de la représentation
graphique du vélo. Une réserve toutefois : la photographie
a fortement évolué ces dernières années (cf. le premier
volet de l’étude).
Cependant, c’est avec respect que je mets ce brillant
illustrateur de la presse sportive en tête de peloton. Très
peu académique, son sens d’observation lui a permis de
croquer les champions, leurs lieutenants, les sans-grades,
les porteurs d’eau et autres gregari del plotone, son art le
dispensant de rédiger une légende élaborée. Ce coup de
patte magique a immortalisé la grande boucle pendant près
d’un demi-siècle. C’est donc avec curiosité et admiration
que j’ai épluché un par un ses dessins.
Ainsi…
après les interminables élucubrations à propos de la « Symphonie
Bicyclette », il coulait de source que je fusse
interpellé par sa vision intitulée « Et
roule…la galère » ? La revue « Miroir Sprint »
publia le dessin à l’occasion de la présentation des
coureurs de la grande boucle en 1949.
Quand on fait le parallèle entre les deux illustrations, une
foule de ressemblances saute aux yeux de quiconque veut bien
s’immerger un tant soit peu dans l’atmosphère de la grande
parade.
Les composantes sont pratiquement identiques d’autant si on
assimile les montagnes grimaçantes aux fumerolles de Dali.
Or, la scène de « « La Symphonie Bicyclette » est un
pot à encre alors que la galère de Pellos est cousue de fil
blanc. Bien mieux qu’une photographie, l’artiste décrit
l’ambiance qui règne au départ de la grande boucle. Les
forçats de la route sont tous crispés en quête de gloire et
de…souffrances. Mais ils sont malgré tout heureux d’avoir
trouvé une place dans cette galère où Henri Desgranges mène
la barque en tête de proue. Quant à Jacques Goddet, qui
opère en tant que maître d’œuvre, il fait le ménage du haut
de la plate-forme alors que dans la fosse aux galériens on
reconnaît Coppi, Bartali, Kubler, Impanis, etc.
Ultime comparaison. Le dessin de Pellos ne dégage
malheureusement pas plus de dynamique que la litho de Dali.
Mais qu’à cela ne tienne, il se rattrapera dès la première
échappée.
Quoi qu’il en soit, il est une certitude que son coup de
crayon et son interprétation des événements sportifs n’ont
pas laissé ses contemporains indifférents. A la même époque
en Belgique, trois humoristes croqueront avec une virtuosité
identique les courses cyclistes et les autres manifestations
sportives.

http://www.marc-sleen.be/fr/accueil
Il s’agit de Marc Sleen,
un caricaturiste de presse, considéré comme l’un des quatre
pères de la bande dessinée flamande, qui égaiera les pages
du « Standaard » pendant un long bail et
Horn (Fernand
Van Horen) qui fut le dessinateur humoriste attitré du
journal « Le Soir ».

Quant à Buth
(Léo De Buth), il eut une idée géniale qui
enthousiasma toute une génération de mouflets et autant
d’adultes. L’aventure démarra en 1947 avec les exploits de
Thomas Pips au Tour
de France, un Thijl Uilenspiegel moderne. Une icône
dans laquelle tout Flamand aime à se reconnaître. Attaché
au journal « Het Volk » (Le Peuple), l’humoriste fit
exploser le tirage quotidien pendant le Tour de France.
Tout en relatant un événement de l’étape, au moyen d’un
dessin bien sûr, le lecteur était appelé à chercher une ou
plusieurs souris dissimulées dans le paysage. Cette belle
histoire se poursuivra jusqu’en 1982.
http://www.ecc-kruishoutem.be/buth_ENG.htm
Ces quatre caricaturistes, parmi une ribambelle d’imagiers
humoristiques et satiriques, ont donc contribué à
populariser le Tour de France, voire à l’édifier en
patrimoine culturel. Ces poètes de l’image ont élevé leur
art, né de la presse sportive, à une notoriété équivalente à
la BD. Mais cette observation est aussi valable pour tous
leurs confrères qu’ils fassent référence ou non au vélo,
quelle que soit la situation, comique ou dramatique.
Aussi est-il faux de croire que les caricaturistes aient
attendu l’avènement du Tour de France pour railler les
travers de leurs contemporains par le biais du vélo !
Avant de poursuivre ma tirade, il me semble qu’une petite
digression à propos de la BD ne ferait pas de tort. En
effet, ébaucher une étude sur le dessin, la caricature et le
strip (fractions de page sous forme de bandes de quelques
images) sans évoquer
Hergé (Georges Remi)
relèverait tout bonnement de crime de lèse-artiste. Passer
outre eût été un sacrilège ! Oncques ne me l’auriez
pardonné, mes tendres loutes bédéphiles. Il est impensable
de dissocier complètement la BD de la caricature bien qu’il
y ait des différences majeures entre les deux disciplines.
Cool please et permettez-moi d’adresser un petit
coucou à celui que l’on considère comme le père de la BD
européenne. En avril 1925, à l’âge de 18 ans à peine
alors que son coup de crayon est encore très mal assuré,
Hergé croque pour « Le Blé qui lève » quatre
dessins sur les « Plaisirs du vélo » où un cyclotouriste
regonfle son pneu tellement fort qu’il le fait exposer. Par
la suite, il fera très peu allusion au vélo dans les
aventures de Tintin. Deux éphémères apparitions à relever.
L’une dans « Le
Lotus bleu » où Tintin
prend la poudre d’escampette sur un vélo d’emprunt, la
seconde dans « Les Bijoux de la
Castafiore » où, une fois de plus, il subtilise
un vélo pour un déplacement imprévu. Jo-El
Azara (Joseph Loeckx),
dessinateur au journal “Tintin”
et créateur de « Taka Takata »
(un petit soldat Nippon, myope et pacifiste),
participa à l’élaboration de cet album. C’est probablement
dans les studios d’Hergé qu’il acquiert un graphisme précis
mettant surtout l’accent sur la lisibilité.
En parallèle,
il mène
aussi une carrière d’illustrateur publicitaire et réalise
entre autres une affiche pour la société Alvarez.
www.taka-takata.com
Un peu moins d’un siècle avant le carrousel de la Grande
Boucle, les dessinateurs de la presse anglaise, ayant pris
pour modèle les archétypes de la société et le folklore,
s’appliquaient à reproduire à l’envi des clichés satiriques.
Les brocardeurs étaient impitoyables passant tous les thèmes
à la moulinette. Débordant d’imagination, ils élaboraient
des scénarios loufoques dans lesquels le peuple se
reconnaissait et s’identifiait. Moyennant des observations
pointues, une déformation des visages, un sur-embellissement
des formes et une extravagance comique des costumes, ces
humoristes se moquaient ouvertement des travers et des
tendances qui animaient le peuple londonien de l’époque.
Des affiches furent spécialement créées à l’intention des
indigents pour leur permettre de participer à la curée des
mœurs.
Aussi, fin 18e – début 19e siècle,
dès l’apparition des draisiennes et des célérifères
ensuite, les caricaturistes ont vite compris que la chute
d’un vélocipédiste engendrait des situations pleines de vie
et de burlesque. Normal donc que le « Royal
Hobby » ait fait les beaux jours de la presse
caricaturale anglaise.

Sous le Second Empire, la presse satirique française
exploita également le thème par l’intermédiaire du
lithographe, Charles
Vernier qui écorcha un peu moins les personnages.

Quant à mon coup de chapeau, il va à
Fred Booty, un
caricaturiste australien du XIXe siècle qui œuvra pour le
compte du Sunday Times et du Sun. Son dessin
dégage un effet de mouvement, ponctué pour la circonstance
d’une courte légende très subtile.

Comme en peinture, il s’avère impossible de prendre en
considération tous les dessinateurs qui ont repris le thème
du vélo dans leurs cartons.
Il ne me reste donc plus qu’à écrémer superficiellement la
liste des ténors qui surfent (ou qui ont surfé) sur
le buzz du jour et qui le passent (ou qui l’ont passé)
à la centrifugeuse.

http://faizant.over-blog.com/article-61667742.html
En tête de liste, je mets
Jacques Faizant
bien qu’il n’ait jamais voulu véhiculer une dynamique de la
bicyclette dans ses dessins. Usant de la forme rétro, voire
anachronique, ses caricatures sont remplies d’une malice
ponctuée d’un trait de vérité moderne. Si je devais lui
attribuer un sobriquet, ce serait celui de bon père
tranquille de la caricature vélocipédique. Ecrivain et
éditorialiste au quotidien « Le Figaro », ce
dessinateur de presse avait tout compris du cyclotourisme.
Ayant retiré une saine philosophie de sa passion, il l’a
rendue au centuple en mettant tout son talent au service de
cette dernière.
En quelques mots, il résume tout un art de vivre :
« Sortir de chez soi avec tout son bien dans une ou deux
sacoches, mettre ses gants, s’asseoir sur sa selle, poser le
pied sur la pédale, regarder le ciel et partir. Le
cyclotourisme, c’est cela. C’est la liberté d’aller là où
l’on veut, par des chemins que l’on aime, à la vitesse que
l’on supporte, dans le temps que l’on s’est donné, avec les
amis que l’on s’est choisi…
Le cyclotourisme, c’est la joie du corps et de l’esprit, la
perplexité des gérontologues et le désespoir des pharmaciens. »
En bon humaniste, ce dernier a préfacé « La
grande meule et la moulinette », l’album de
Guy Perpère, un
humoriste et fabuliste qui s’exprime par le biais d’une
planche de 8 à 9 dessins limpides et expressifs.

Voici l’éloge qu’il formule à son égard : « Guy
Perpère, qui a fait les beaux jours de la revue
« Cyclotourisme » de la FFCT, est un humoriste d’humeur et
de talent constant…Le dessin d’humour s’exerçant toujours au
détriment du sujet traité, il est extrêmement difficile de
se moquer de ce que l’on aime sauf à le faire avec
tendresse, ce qui est précisément le cas ici.. »
Mon ultime allusion à la BD, je l’adresse à
Christian Lax,
l’auteur de « L’Aigle sans
orteils ». Une histoire poignante qui laisse le
lecteur sans répit, ce dernier ne parvenant jamais à
décrocher la roue du héros avant l’arrivée.
Exit et désolé pour les laissés-pour-compte tels que les
Garréra, Graton, Franquin et tous les
autres qui ont donné ou donnent encore des lettres de
noblesse à la BD grâce à la création de figures
emblématiques comme les
Vélomaniacs, Michel
Vaillant, Gaston Lagaffe, etc. dont
l’énumération ne peut qu’éveiller de la mélancolie parmi
plus d’un d’entre-nous.
Au cours de mes errances sur le net, j’ai observé une
particularité récurrente qui revient aussi bien en dessin
qu’en écriture : au plus l’auteur est un adepte passionné,
au plus le trait est juste et la description palpitante.
A l’inverse de « Marianne »,
le personnage fétiche de Jacques Faizant, le graphisme
dépouillé du « Chat »
renforce le message que
Philippe Geluck tient à faire passer auprès du
public. Il considère le dessin comme un coup de boule, un
concentré d’idées qui surgit comme tel. Cela doit être une
image qui jaillit d’emblée. Le texte au contraire est une
introspection dans laquelle il part sans savoir où il
arrive, dit-il. Certaines de ses légendes le surprennent.
Aussi écrit-il et réécrit-il très souvent ses textes. Par
ailleurs, il aime faire appel à la zwanze bruxelloise pour
en accentuer le surréalisme. Il s’exprime très souvent par
l’intermédiaire d’un dessin d’humour en deux ou trois cases
disposés horizontalement. Toutefois, comme son « Chat »
affirme que « si
je roule à vélo, c’est uniquement parce que je n’ai pas
trouvé quoi faire d’autre avec un vélo »
ou bien encore
« si je devais vraiment
rouler à mon rythme, je ne roulerais pas », je
crains que le cyclotourisme ne soit pas son truc. Au
suivant !

http://www.geluck.com/geluck.html
Un autre géant du « comics strip » fut
Guy Bara (Guy
Willems) qui railla les mœurs des golden sixties par
l’entremise de son héros, Max l’Explorateur, un
personnage atypique en tenue coloniale tout à fait décalé
avec son époque. Il collabora de nombreuses années au
magazine satirique du « Pourquoi pas ? ». Un
hebdomadaire belge qui passait l’actualité au crible et qui
accueillait à bras ouverts les brocardeurs de tout poil.
Un périodique qui s’ingéniait à sortir des cadavres des
tiroirs comme le fit en France un siècle plus tôt «
Le Grelot », « L’Eclipse », « Le Sans-Culotte », « Le
Bouffon », etc. Un demi-siècle avant Hara-Hiri
et Charlie Hebdo.

http://guybara.blogspot.com
Ce constat me donne l’occasion d’ouvrir une page spéciale où
le vélo métaphorise un tas de situations cocasses. En effet,
la « petite reine » est très prisée pour commenter
les décisions politico-politiciennes.
Les caricatures politiques apparaissent d’habitude à la page
éditoriale d’un quotidien ou d’une revue. C’est un art
visuel dans lequel le caricaturiste s’efforce de faire
valoir son point de vue à propos d’une situation ou d’un
événement scandaleux, loufoque ou bizarre. Il faut savoir
que les caricaturistes ont différentes techniques à leur
disposition pour faire passer leurs messages. Les uns
exagèreront les caractéristiques propres à un personnage
pour le rendre reconnaissable comme le faisait les
dessinateurs anglais du 18e siècle, d’autres
préfèreront procéder par analogie c'est-à-dire représenter
une situation par une image différente mais dont le contexte
est similaire.

Et me revoilà au pied du mur hutois ! Celui des
lamentations d’Anne-Marie ! Qui vais-je choisir comme
porte-drapeau pour représenter tous ces dessinateurs qui se
pètent les neurones pour passer en tête sous la banderole ?
A qui le privilège ? Le styliste parfait ? Le graphiste
méticuleux ?Le suceur de graphite qui s’ingénie à trouver la
formule idéale ? Le bulliste hors norme ?
Bullshit!
It’s all the same!
La voie royale des Champs Elysées de la caricature grouille
de monde. Les places sont hors concours ! Pour mémoire,
les Albert, Turner, Euvrard, Felix, Royer, Brasser, Plantu,
Iturria, Vadot, Chappatte, Dubus, Bellus, Dubouck, Lanvin,
Kristian, Kari, Vicky, Simoni, et veux-tu encore des Cabu ?
Non ! Alors, voilà des Zaza, tous plus féroces les uns que
les autres !

Au fait, à propos du « Pourquoi Pas ? », pourquoi
pas ne pas céder le relais à la paluche brocardeuse de
Pierre Kroll ?
Un ancien du magazine éponyme. Un artiste éclectique qui
respire la forme dans toutes les disciplines confondues.
Animateur à la télé, illustrateur, auteur et comédien sont
quelques facettes dans lesquelles l’humoriste brille partout
avec autant de bonheur. Tous les dimanches midi à la télé,
il étripe une sournoiserie politicienne, une escroquerie
bancaire, un coup de gueule d’un partenaire social, une
fumisterie sportive, une imposture religieuse, etc. Il
passe la mauvaise foi et les faux-semblants à la moulinette
et au lieu d’en sortir du hachis parmentier, il met en
évidence le gâchis entier exploité par les éblouis du
promontoire. Sa
dextre démarre sur la feuille en moins de deux. Aérienne,
elle trace des traits énergiques qui superposent les traits
flous en un tournemain. Le poignet souple, les doigts
décontractés. Il ne relève la tête qu’en fin de carton. A
la rigueur, il examine encore une fois le tracé et crayonne
éventuellement un détail mal venu en le noyant dans une
furia de ronds ou de zigzags. Comme les croquis sont
réalisés à la main levée, souvent en présence d’une caméra,
je suppose que logiciel, calques, vectorisation et
colorisation sont tous logés aux abonnés absents. Pas le
temps de soigner outre mesure la recherche graphique, la
mise en page et le crayonné. Dessin et trait d’humour
jaillissent en un tour de manivelle ! De par son attitude,
il se démarque tout à fait de l’humour un peu potache de la
bande dessinée franco-belge, notre Tintin national emmenant
le peloton.
 

 
http://www.kroll.be/index.php?option=moi
Le Campionissimo et le Cannibale nous ramènent
bille en tête sur le Tour de France qui reste encore et
toujours la vache à lait des caricaturistes sportifs.

Le Campionissimo & l’Auguste père Bruffaerts
Au tour du Cannibale…
Un mot à propos de C.
Leboul, un peintre breton qui a le mérite d’avoir
représenté avec beaucoup de justesse celui que Luc
Varenne impatronisa en prince de légende : « Eddy, mon
petit ». Le critique littéraire sampétrusien Alain Viray
mettait le doigté de l’artiste en valeur en précisant : « Claude
Leboul décline la force élémentaire, celle qui vient des
jarrets, du corps tendu et du souffle, la volonté du
champion en mouvement, les tensions d’une lutte au sommet.
Il n’oublie pas les masques des cyclistes, visages
infiniment déformés par l’effort ».


C’était au temps où…
http://www.cyclojose.be/ColdesChamps.html
Autre style, même combat.
Philippe Tastet
est un humoriste contemporain qui se fait un point d’honneur
d’appliquer la chronique d’André Laurens qui opéra comme
premier médiateur de presse en France au journal « Le
Monde » :
« Le dessin est, dans la presse, une autre
façon de réagir à l’actualité. Le rédacteur (idéal) décrit,
explique, analyse avec souci du détail, la volonté d’être
complet, le sens de la nuance, de la mesure et de la
distance. Le dessinateur exprime un état d’esprit, une
émotion ; il donne un coup de projecteur, résume une
situation en une synthèse graphique inattendue, il opère des
rapprochements détonants. Le dessin est réactif, subjectif,
virulent ou tendre, réducteur et spontanément ouvert à
l’imagination… »
Il faut reconnaître que l’artiste réussit à
mettre en musique cette ligne de conduite dans laquelle il
parvient à inclure très souvent l’effet de dynamique. Un
détail qui n’est pas toujours évident chez tous ses
confrères. Les uns préfèrent avantager le contenu de la
bulle, d’autres soignent davantage le graphisme au détriment
de la légende.
L’idéal bien sûr se résumant à combiner en toute harmonie
les deux méthodes. Pour que l’interprétation ne prête pas à
confusion, Philippe Tastet n’hésite donc pas à ponctuer ses
dessins par un mot d’explication. Excellente idée ! Cela
permet de resituer et restituer l’action dans le temps.
Cette remarque vaut autant pour la presse sportive que pour
l’actualité politique, sociale et autres.
Car, comment voulez-vous interpréter et décoder un dessin
sans connaître le fin fond du sujet ?

http://www.philippetastet.com

A
l’approche du 07.07.2007,
deuxième anniversaire des attentats sanglants de Londres
et le jour où
le départ du Tour de France sera donné dans la capitale
britannique,
la vigilance doit être redoublée.
A l’inverse de la peinture, le dessin caricatural, qui se
veut le reflet d’une situation ou d’une attitude à un moment
bien déterminé, a souvent du mal à bien vieillir. Bis
repetita. Un fait d’actualité ne se commente plus de
la même façon avec quelques années de recul. C’est la raison
pour laquelle j’ai un faible pour les « Parisiennes »
de Kiraz qui
n’ont pas pris une seule ride depuis leur création.
La parisienne de Kiraz est une sérial shoppeuse aux grands
yeux en amandes, la bouche sensuelle en forme de cul de
poule et les cheveux fins et raides. C’est une croqueuse
d’hommes qui n’hésite pas à troquer une mini ravageuse,
découvrant la quasi-totalité de ses gambettes interminables,
pour une jupe glamour ou un mini bikini. Juchée en
équilibre instable sur des escarpins, elle s’applique à
mettre en valeur sa croupe callipyge et ses petits nénés
hauts perchés. « Fashion » jusqu’au bout des ongles, elle
met tout en œuvre pour scotcher les regards sur sa petite
personne. Et pourtant, en dépit de son apparence
provocante, elle arbore un petit côté godiche qui lui permet
de bien faire passer la pilule. Manipulatrice et
indémodable, cette nymphette, sexy en diable, est un numéro
avec qui tout homme se fait une joie d’emmener Popaul au
cirque ! Ravageuse ! Intemporelle, elle est devenue l’icône
de la ville lumière.
« L’allure, le style, la démarche, les poses, jusqu’aux
mimiques, on voit qu’Edmond Kiraz est un amoureux des
femmes. Il les regarde et elles sont tellement charmantes
qu’à leur vue, il les croque (…) »
rappelle Olivier Dassault.
Un trait de crayon et une légende qui plaisent encore et
toujours à l’heure actuelle. Des dessins qui ne cessent de
faire mouche. Bientôt un demi-siècle de bouteille et « la
parisienne » est toujours dans le vent avec autant de
fraîcheur ! Le rêve de toutes les nanas !

Je me demande
si je noie mon chagrin
dans le travail
ou
dans un autre grand amour
Je ne pouvais décemment pas terminer mon exposé sans
adresser un petit flash à un vieux complice matheux qui se
bagarre depuis des décennies avec la pesanteur et les
résistances. Ce qui l’a amené à décomposer les forces, les
dodécomposer, les fractionner, les diviser, les sectionner,
les proportionner, les vectoriser, les relativiser et puis
les collationner, les recomposer, les champagniser, les
allégoriser et finalement les gobertiser en vue de découvrir
la roue philosophale de la petite reine !
Ses folles échappées sont à découvrir dans l’encyclopédie
Cotacol :
http://kuitenbijters.com/index.php/de-encyclopedie-cotacol
Je suis persuadé que mon ami Daniel finira par trouver la
formule pour qu’un jour tout vélo s’en vole sans peine, ni
assistance à la conquête des plus hauts sommets.
En attendant, il fait grimper les cyclos d’Europe et
d’ailleurs grâce à son :
http://www.challenge-big.eu
.png)
Mais voilà ! Avant les élucubrations de Daniel, il y eut
les débordements d’Archimède, la chute libre d’une « Pink
Lady » et peu après au 19e s. les
extravagances d’un certain
Christophe
(Georges Colomb). A ne pas confondre avec le patron des
routards, ni avec le célèbre navigateur génois. Œuf
corse, vous rétorquerait l’astucieux commissaire
San-Antonio. En effet ! Puisqu’il s’agit d’un
biologiste de formation et auteur d’histoires illustrées qui
eut la très bonne idée d’introduire l’humour dans de
nombreuses matières pédagogiques. Ce moraliste dans l’âme
créa de toute pièce un petit « Einstein » avant la
lettre. Un savant obnubilé par une idée fixe qui supplante
largement les divagations philo-physico-matheuses de mon ami
Daniel alias Presi-Dan. Pancrace Eusèbe Zéphyrin Brioché,
dit « Savant Cosinus »
inventa 36 systèmes de locomotion pour faire le tour du
monde dont l’ingénieux, l’incomparable et l’inégalable super
bici ex machina :
l’anémélectroreculpédalicoupeventombrosoparacloucycle.
Une bicyclette révolutionnaire propulsée par une petite
voile arrière (aném), équipée d’un petit
moteur électrique (électro) s’inspirant du
principe de la réaction (recul), munie de
pédales (pédali), protégée par un coupe-vent
destiné à favoriser la pénétration dans l’air (coupe-vent),
coiffée d’un parasol faisant fonction de cockpit (ombroso),
pourvue d’un chasse clou pour prévenir les crevaisons (para-clou),
le tout étant monté sur une paire de roues (cycle).

Extrait :
« La trouvaille de Cosinus se résume à un engin dans lequel
sont utilisées toutes les forces propulsives connues et même
inconnues. Il l'a fait exécuter et un beau jour il s'élance
suivi de Sphéroïde
(son chien). Malheureusement les détonations successives et répétées
de l'appareil à recul ont pour effet de faire naître une
émotion intense dans la gent canine, naturellement ennemie
des progrès qu'elle ne comprend pas. Je connais bien des
gens qui seraient, à ce point de vue, dignes d'être
chiens… »
Hélas, ce super bike ni aucune autre de ses inventions
farfelues ne parviendront à aller au-delà de la banlieue.
Son humour se décline au premier degré et plus finement en
seconde lecture.
Retrouvez les aventures sur :
http://aulas.pierre.free.fr/chr_cos_01.html
Si la « Parisienne » est toujours fringante après un
demi-siècle, « l’idée fixe du Savant Cosinus », en
revanche, a accédé à l’immortalité grâce au génie de
Goscinny et
Uderzo qui
l’ont bombardé légionnaire romain à la solde de Tullius
Detritus, le plus abject semeur de « Zizanie » que la
Gaule d’Astérix n’ait jamais connu. Acta est fabula.
Fin du tour d’horizon sur le dessin d’actualité et la
caricature, une rétrospective qui est sans conteste beaucoup
trop subjective, artificielle, partiale et personnelle mais
qui met le pied à la pédale pour quiconque veut élargir son
champ de vision en la matière.

Par conséquent, hors de question d’attribuer un bouquet de
fleurs comme à chaque arrivée de course cycliste, mais mise
à l’honneur d’un trio de repêchés. Comme au keirin. Et, en
bien en tout honneur, allons donc « Au
Vélodrome », chez mon premier repêché.
En évoquant Jean
Metzinger, il n’entre absolument pas dans mes
intentions de rouvrir le débat entre les cubistes et les
futuristes. Considéré comme « cubiste de salon », il puise
ses sujets dans les spectacles populaires du sport ou de la
danse.
Et pourtant… Dans son œuvre
intitulée « Le Cycliste »,
il opère une symbiose entre les deux tendances de l’époque,
ce qui le situe bien à l’avance de son temps dans le Pop Art
et la bande dessinée. Cycliste et arrière plan sont réduits
à des formes géométriques, en conformité donc avec
l’esthétique prônée par le cubisme. Mais comme le peintre a
ajouté les effets de vitesse et de mouvement, il est
indéniable que le tableau dégage aussi une prédisposition
prononcée pour le futurisme.

Mon second repêché sera un « ex-conquérant de
l’espace ». Carmelo
Cappello est considéré comme le plus grand
interprète du ‘spatialisme’ dans le domaine de la
sculpture dont le programme se définit :
« ni peinture, ni sculpture, mais formes, couleurs et
sons dans l’espace ».
L’idée de base du spatialisme est d’ouvrir la
pratique artistique aux avancées scientifiques les plus
récentes ce qui se traduit en somme par la conquête de
l’espace.

Les lignes aériennes et le mouvement dégagés
par « Velo azzuiro »
font de cette lithographie un archétype de cette école
artistique. Pour ma part, je retrouve aussi dans cette
représentation un peu de similitude avec l’’envolée de
Hajime Kato. Avec un brin d’imagination, on y détecte même
les idées maîtresses du futurisme : vitesse, mouvement, modernité.
http://www.jeffparr-veloart.com
Quant au dernier élu, c’est un cycliste britannique
passionné, Jeff Parr,
qui jaillit du peloton à la manière de son
compatriote Mark Cavendish.
Pour le last jump, je cède volontiers la
plume aux critiques artistiques contemporains de Jeff.
“Throughout his professional career, Jeff’s passion and
inspiration has always been the vélo.
His emotions are portrayed so vividly in his paintings
with a sense of speed, excitement and beauty of
movement.
Today's acrylics and oil paints, with their luminosity
and vibrancy, allow him to juxtapose the transitory and
fleeting motion of the peloton in contrast with an
immutable environment.
Depicting the legends, the passion, the evocative
sensations whilst also paying homage to the greats of
professional cycling over the decades, he invites the
viewers into his paintings without necessarily making it
easy for them."

Traduction libre :
« Tout au long de sa carrière professionnelle, le vélo a
toujours été la passion et la source d’inspiration de
Jeff. Son art est imprégné de ses vives émotions, qui
se traduisent dans son œuvre par une dynamique où la
beauté du mouvement éclabousse le visiteur dès le
premier coup d’œil.
La luminance et la vibrance des peintures à l’huile et
acryliques actuelles lui permettent de juxtaposer le
mouvement éphémère et fugace d’un peloton et de le
contraster par rapport à un environnement statique.
En croquant la légende du cycle et les passions qu’elle
déchaîne d’une part, et les états d’âme renforcés par
le respect qu’il convient de témoigner aux champions
cyclistes professionnels d’autre part, il invite les
visiteurs dans son univers sans pour autant leur donner
le sésame de son univers. »
Il me semble que le commentaire résume assez bien le
brio du peintre qui, pour parvenir à ses fins, utilise
divers supports et surmonte le défi artistique en
maîtrisant le mouvement et l’abstraction spatiale. Il
séduit l’amateur d’art de par l’association de
différents courants artistiques tels que
l’impressionnisme, le surréalisme et le futurisme pour
ne citer que ceux-là. Aussi ne suis-je absolument pas
surpris de retrouver dans ses toiles des allusions à des
peintres comme
Shigedi Kuroda ou Hajime Kato. En cela, il a été
devancé par une foule d’artistes, dont pas les moindres.
Ainsi en dépoussiérant mon chiffonnier, j’ai retrouvé « Le
Sprinter », une reproduction de Salvador Dali
qui ressemble furieusement au « Ciclista »
d’Umberto Boccioni.
Or, le maître du surréalisme n’était qu’un enfant à
l’époque. Ce qui a tend à dire que tout artiste
peintre, quel qu’il soit, subit volontairement ou sans
s’en rendre compte, des influences extérieures.
Quant à la question fondamentale concernant la
vérité artistique, je la verrais située quelque part
entre toutes les différentes esthétiques !
Vrai ou faux ? Bof !
A chacun sa vérité.


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